Traduction, localisation, internationalisation… ou comment ne pas perdre son latin dans le marché de la transformation linguistique

Dans un monde de plus en plus tourné vers les échanges entres les pays et le développement de marchés connexes, les compagnies doivent se poser des questions sur quelle méthode utiliser afin d’adapter leurs produits à un marché spécifique. Que ce soit un livre, un jeu vidéo, un site Internet, l’emballage d’un item, un article ou tout autre produit, dès qu’il est question de nouveau marché on se doit d’adapter le contenu écrit lié à ce produit. Dans ce cas, facile: plus qu’à traduire les texte et bingo! Ce n’est malheureusement pas si simple; il existe en effet diverses manière d’adapter la langue d’un produit et il est primordial de bien comprendre ce que ces concepts impliquent afin de s’assurer d’obtenir une adaptation adéquate.

La catégorie la plus simple est bien entendu de ne rien changer. Si votre produit est, par exemple, en anglais, eh bien vous pouvez ne l’ouvrir qu’à des pays anglophone (idem pour une compagnie francophone) et tant pis pour les autres. Ils apprendront la langue ou se passeront d’explications. Mais même en ne s’adressant qu’à une public restreint, ce n’est pas si simple: les sensibilités divergent dans toutes les cultures, et même si on se comprend au niveau purement linguistique, il peut être difficile d’accrocher de nouveaux clients si on ne fait pas attention à certaines choses. Bon, je vais au-devant de moi-même, alors débutons par le début.

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La traduction

La traduction consiste à prendre un texte dans une langue et à le rendre dans une autre langue. Certaines personnes semblent penser qu’une traduction ne vise qu’à traduire les mots un par un pour rendre le texte dans son intégralité. Si c’était si simple, Google Translate ne serait plus que le seul traducteur employé. Non, on ne traduit pas simplement des mots, mais des idées. Les langues ont toutes une manière de penser qui diffère; il y a bien entendu des idiomes ou des manières de parler, mais tout cela va bien plus loin. Une bonne traduction est une traduction invisible, c’est-à-dire que le lecteur devrait ne pas s’apercevoir qu’il est en train de lire un texte originellement écrit dans une autre langue. Il s’agit bien entendu d’un idéal, mais le lecteur ne devrait pas avoir à se demander ce que l’auteur a bien pu vouloir écrire dans le texte d’origine. Il faut bien entendu faire parfois quelques modifications afin que le texte ait encore du sens dans la langue cible, ou encore éliminer et ajouter certains éléments linguistiques, mais au final, il faut respecter les idées du texte d’origine pour rester le plus près possible de ce dernier sans aliéner les lecteurs. C’est un équilibre difficile à atteindre, et il faut parfois faire des choix difficiles afin d’avoir un texte final qui se lit naturellement.

La localisation

La localisation consiste à transformer un texte (ou un autre médium: il y a bien entendu des localisations visuelles, auditives ou autres) pour l’adapter à une autre culture. Attention, la localisation peut se faire au niveau linguistique (ce qui implique donc une traduction), mais on peut aussi localiser un texte en gardant la même langue (par exemple, localiser un produit de la France pour l’adapter au marché Québécois ou Maghrébin). Lorsqu’il a changement de langue, on parle de localisation lorsqu’on demande expressément au traducteur de changer certains éléments pour que les membres de la communauté du marché visé se reconnaissent d’avantage dans le produit. Il peut s’agir de l’humour, de références alimentaires ou cosmétiques, de valeur vis-à-vis du sexe ou de l’argent, de symbole, etc. Il faut parfois couper certains éléments, ou en remplacer d’autres afin de mieux répondre aux exigence d’un autre marché. Encore une fois, une bonne localisation ne doit pas paraître pour le lecteur du texte final. Il ne doit pas avoir l’impression de manquer une référence.

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La Trans-création

L’un des derniers termes du domaine de la traduction et de l’écriture commerciale, la trans-création implique ré-écrire un texte afin de l’adapter complètement au marché visé. Certains textes ne peuvent passer autrement que par cette étape: lorsqu’on parle de slogan ou de publicité, il est presque impossible de traduire mot-à-mot ou de ne changer qu’un ou deux terme et garder le même impact. Il est préférable de le réécrire et de changer complètement le texte afin de mieux répondre aux exigences du marché. On va parfois bien plus loin que dans une simple localisation et la trans-création peut aussi impliquer de changer l’aspect visuel d’un produit.

L’internationalisation

L’internationalisation implique de créer le produit dès le début avec pour objectif de le rendre facile à localiser dans un certain nombre de cultures différentes. Beaucoup de grandes compagnies commencent à penser leurs produits de cette façon (comme par exemple Hollywood qui mets de plus en plus la Chine en avant-plan de ses productions, ou Coca-Cola qui crée ses campagnes de marketing pour toute l’Amérique du Nord). En contrepartie, on risque de se retrouver devant une homogénéisation de la culture; car même si les compagnies créent le produit avec l’idée de le localiser, moins il y a de changements à faire, moins il y a de coûts liés à ces localisations.

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La globalisation

Lorsqu’on parle d’homogénéisation de la culture, c’est la globalisation qui arrive en tête de liste. La globalisation consiste à créer le produit dans l’idée de le vendre tel-quel dans le plus grand nombre de marchés possibles. On pense alors les slogans, la publicité, la packaging du produit; bref tout avec l’idée de le vendre de la même manière dans le plus d’endroits possibles. Pas de localisation, il ne suffit plus que de traduire certaines phrases clés, et le tour est joué. On va parfois jusqu’à ne rien traduire du tout dans certains marché, comme par exemple en France, où il est assez courant de voir des publicité de voiture entièrement en anglais. Là, c’est le rêve des grosses compagnies: mettre le paquet sur la reconnaissance de marque pour éviter de débourser le moins possible en traduction ou localisation.

Le problème, c’est que le produit perd toute identité : à trop vouloir intégrer de marché différent sans fâcher personne, on finit par avoir un produit lisse dénué de toute identité culturelle. On le reconnaît partout, certes, mais le consommateur peut avoir l’impression de ne pas compter pour la compagnie. Ou pire encore, le produit, et par conséquent la compagnie qui y est associée, peuvent devenir synonyme d’envahissement, comme certaines compagnies américaines se sont retrouvées traitées de colonisateurs par certains à cause de cette attitude cavalière de ne pas respecter les marchés ciblés. Mais bon, ce sont là des débats pour une autre fois.

Des concepts qui s’emboîtent

Comme vous avez pu le constater, ces concepts ne sont pas entièrement blancs ou noirs; lumiereils s’emboîtent les uns dans les autres. Une bonne traduction peut contenir quelques éléments de localisation; une bonne localisation passe essentiellement par une bonne traduction; la globalisation et l’internationalisation peuvent nécessiter des traductions et de la localisations; une campagne pour un produit international demander une trans-création dans certains marchés… Un bon traducteur doit donc savoir jongler avec ces concepts afin de pouvoir répondre aux besoins de son client. Un client qui demande de traduire un site Internet qui s’adresse à toute la francophonie demande une forme de globalisation: le français utilisé différera d’un site Internet qui s’adresse à l’Amérique du nord francophone, d’un site qui s’adresse principalement à des Suisses francophones ou à seulement des Québécois. Le traducteur doit donc s’assurer de bien choisir les termes, les références, les idiomes, etc. pour s’assurer d’être compris de la même manière partout dans la francophonie. Une oeuvre littéraire bien traduite doit garder l’identité et la culture de la langue de départ, mais on ne doit pas avoir l’impression de lire une traduction. Certaines blagues peuvent nécessiter des changements, certains noms être traduits, etc. Et le public cible peut aussi changer le type de traduction: il va de soit qu’on ne traduit pas un roman jeunesse (qu’on localise parfois bien plus) comme une oeuvre littéraire majeure.

Conclusion

Il est important de définir tous ces termes, mais il est aussi important de comprendre que ces derniers n’ont pas des frontières nettes. Ils servent simplement de balise afin de savoir ce que désire le client pour son adaptation à de nouveaux marchés. C’est ensuite au traducteur de s’assurer un travail de qualité et de remettre un produit final qui correspond aux attentes précise du client. Que ce soit en changeant certains éléments avec une localisation, de réécrire un slogan par la trans-création ou de penser un produit pour le marché international par la globalisation, il y a moult façons d’adapter un produit de la manière qui convient le mieux au marché visé.

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Bibliographie et sources intéressantes sur le sujet

Bastin, Georges. De la traduction publicitaire à la communication multilingue, publié dans Meta: le journal des traducteurs, vol. 54, no.3, sep. 2009 p.417-430. Consulté en ligne le 20 janvier 2017.
Globalization, Localization, Internationalization and Translation, consulté le 23 janvier 2017 (en anglais)
Vita, AllessandraTranslation, localization and transcreation: what’s the difference?, consulté le 23 janvier 2017 (en anglais)
De Martino and all. Balancing localization and globalization:exploring the impact of firm internationalization on a regional cluster, Entrepreneurship and Regional Devellopement, vol. 18, issue no.1, 2006. Sur le net: Consulté le 21 janvier 2017 (en anglais)
Russo, Patricia and Boor, Stephen. How fluent is your interface?: designing for international users, Proceedings of the INTERACT ’93, p. 342-347, 1993. (en anglais) *un article un peu plus âgé, mais les fondements restent tout de même actuels pour ce qui a trait à l’internationalisation d’une interface web.
Chuang, Ling-Ting. The Concept of Globalization and Localisation, -paru originellement dans le Translation Journal en 2010, consulté en ligne le 21 janvier 2017 (en anglais).
Larson, Émily. Traduction ou localisation: quelle solution pour mon site web?, paru sur le site de Lat Traduction et Marketing, consulté le 21 janvier 2017.
Pauline D. Transcreation vs Translation. Cultures Connection, sur le net, consulté le 21 janvier 2017.